Face à l’effondrement, la décroissance !
Vincent Liegey, essayiste et objecteur de croissance, nous explique pourquoi la décroissance peut être un moyen de concrétiser politiquement une transformation silencieuse de la société.
Au printemps 2016, le journal Politis publie un dossier sur la décroissance intitulé « Une révolution silencieuse ? »(1). En effet, la décroissance en France semble moins visible dans les débats politiques qu’il y a quelques années. Pourtant elle gagne du terrain dans les têtes, beaucoup de ses idées centrales s’imposent dans les débats, certes souvent déconnectées les unes des autres. Assisterait-on à une transformation silencieuse de la société ? Est-ce suffisant ? Cet article propose d’abord une mise en perspective des avancées culturelles et sociétales de certaines idées et thématiques portées par la décroissance. Ces avancées sont accompagnées de chocs, de prises de consciences sur l’effondrement : offrent t-elles un terrain toujours plus fertile à une transformation salvatrice et émancipatrice ? Dans un deuxième temps, il pose la question des risques de récupération et défis que rencontrent ces avancées : pourquoi une transformation culturelle est nécessaire mais non suffisante ? Enfin, la troisième partie, en guise de conclusion, propose des pistes de solutions s’appuyant sur ces avancées ou comment les concrétiser.
LA TRANSITION EST EN MARCHE ?
A. DES CHOCS, DES PRISES DE CONSCIENCE, DU MAL-ÊTRE : UN TERRAIN FERTILE ?
Nos sociétés sont traversées par des chocs et des catastrophes : phénomènes météorologiques exceptionnels toujours plus forts et plus fréquents (l’été 2018 a semble-t-il marqué les esprits de ce point de vue !), catastrophes industrielles, crises et instabilités économiques, chômage et montée des inégalités, plans d’austérité, terrorisme, « crise » des réfugiés et des migrants, chocs politiques, du Brexit à l’élection de Trump pour ne citer que ces deux exemples.
Cette situation qui inquiète et nous interpelle, offre de la légitimité à des idées plus radicales, pour le pire, avec la « stratégie du choc »(2) ou peut-être de manière salvatrice avec la « pédagogie des catastrophes »(3). Toutefois force est de constater qu’elle permet des questionnements et débats sur les fondements et limites de notre modèle de société basé sur le toujours plus.
B. COLLAPSOLOGIE ?
En parallèle, un consensus relativement large s’est installé dans nos sociétés quant aux enjeux écologiques : là où, il y a quelques années, le changement climatique ou encore la chute de la biodiversité étaient ignorés ou secondaires dans les débats, ils ne peuvent dorénavant plus être ni éludés ni rejetés.
Ainsi, en novembre 2017, Le Figaro titrait « Nous mettons en péril notre avenir » et Le Monde « Le cri d’alarme de quinze mille scientifiques sur l’état de la planète » suite au manifeste signé par 15 364 scientifiques de 184 pays, paru dans la revue BioScience(4). Cela est encore encore plus spectaculaire à la suite de la démission médiatique et politisée du ministre de la Transition écologique et solidaire du gouvernement Macron, Nicolas Hulot. Ce retrait a été suivi par un grand nombre de tribunes, appels, textes collectifs appelant à un sursaut politique, à un changement de paradigme.
Cette prise de conscience sur l’ampleur des enjeux offre une légitimité aux idées de la décroissance qui sont aujourd’hui écoutées, mais pas nécessairement entendues. La décroissance nécessite des transformations radicales qui paraissent difficiles à enclencher, et la multidimensionnalité de son approche est difficilement traduisible dans un espace médiatique et politique qui tend à partitionner et segmenter son approche systémique, pourtant nécessaire.
C. MAL-ÊTRE AU TRAVAIL ?
L’urgence n’est pas seulement environnementale, mais aussi sociale et culturelle. Ainsi, plusieurs études et indicateurs soulignent le mal-être grandissant dans nos sociétés occidentales face à une perte de sens, au stress, à la dictature des indicateurs (en particulier économiques) et la mise en place d’objectifs absurdes ou impossibles ou encore à l’instabilité économiques. Ces dernières années, ont vu paraître articles et études sur le mal-être au travail : travailleurs pauvres, « burn-out », « bore-out » ou encore « brown-out » et autres « bullshit jobs »(5)…
D. ECONOMICISATION DU MONDE ?
Ce mal-être est lié à notre modèle sociétal englué dans la religion de l’économie. Ainsi, la crise de 2008 a mis en avant les pratiques et dérives de la financiarisation de l’économie. Les banques et le système financier, sauvés par les pouvoirs publics, semblent s’être enfermés dans les mêmes dynamiques mortifères. En parallèle, le développement du journalisme d’investigation ont mis en évidence scandales politiques (évasion fiscale généralisée avec les Panama Papers et LuxLeaks) ou industriels (du Dieselgate impliquant presque l’ensemble des compagnies automobiles à l’obsolescence programmée avérée avec le cas des iPhones 6 et 7). Enfin, la montée des inégalités participe à créer un climat de défiance envers les élites médiatiques et économiques (voir les rapports annuels de l’ONG Oxfam qui souligne que « les 1 % les plus riches possèdent désormais davantage que les 99 % restants » et cette dynamique ne fait que s’accélérer).
E. DES IDÉES PORTÉES PAR LA DÉCROISSANCE GAGNENT DU TERRAIN
Plusieurs études convergentes semblent montrer que des idées, thématiques et pratiques portées, entre autres, par la décroissance interpellent culturellement nos sociétés. Il y a quelques années ce slogan provocateur suscitait ignorance, moquerie ou rejet violent. Bien qu’il soit toujours critiqué, le mouvement semble dorénavant crédible et légitime, mais c’est surtout ce qu’il porte comme projet qui semble culturellement infuser.
De plus en plus de citoyens questionnent leurs consommations : réutilisation, partage, réparation, refus du jetable ou encore de nouvelles manières de voyager (local et en vélo), de vivre son temps libre ou de manger (vente directe, de saison, moins de viande). L’étude Greenflex d’Ethicity réalisée en 2016 conclut : « Dans un climat de perte de confiance, les préoccupations santé, bien-être, le souci du local et du social se renforcent et apparaissent plus que jamais comme majeurs pour les Français. Les tendances constatées depuis quelques années s’inscrivent dans les comportements de chacun : le consommateur agit de plus en plus comme un citoyen engagé. » Même si ces tendances sont intéressantes, elle restent minoritaires et insuffisantes, tant le mode de consommation occidentale se répand partout sur la planète et crée des pressions terrifiantes sur l’environnement (en particulier à travers l’accaparement des terres).
Partout à travers le monde on assiste à l’émergence d’alternatives citoyennes locales comme montré dans l‘ouvrage Un million de révolutions tranquilles(6) : jardins partagés, AMAP, coopératives, Do It Yourself, monnaies locales, villes en transition, etc. Au-delà de ces dynamiques intéressantes, on peut souligner l’engouement public pour un film comme Demain (« plus d’1 million de spectateurs en France, distribué dans 27 pays, César 2016 du meilleur documentaire ! »)(7) qui confirme l’intérêt grandissant pour des pas-de-côté salvateurs et pour des solutions locales, démocratiques, non violentes ou encore conviviales.
Plus intéressant et peut-être aussi surprenant, deux enquêtes récentes montrent que ces prises de conscience et la montée d’un certain mal-être face à l’absurdité de notre système dominé par le toujours plus et le profit, ouvrent de nouvelles voies. Ainsi, dans une étude auprès de jeunes français autour de la COP21, 34 % des 15-30 ans prônent « un changement de notre mode de vie et la décroissance » pour répondre aux enjeux climatiques ; les autres réponses étant de forcer les entreprises à diminuer leurs émissions de CO2 sous peine de sanctions (39% ), d’encourager le développement rapide des GreenTechs, les nouvelles technologies liées à l’environnement (32%), de relocaliser les industries et l’agriculture afin de limiter les transports de marchandises (21%) et de développer l’économie du partage ou encore l’économie sociale et solidaire (17%). Une autre étudeeffectuée en France, Allemagne Italie et Espagne, place la décroissance en tête des scénarios les plus souhaitables : 47% soutiennent la décroissance, 36% le collaboratif et seulement 17% soutiennent le transhumanisme.
Il ne s’agit que d’ordres de grandeur qui toutefois confirment les tendances que l’on peut observer. Ainsi, la décroissance, en optant pour des modalités d’action moins visibles dans l’espace médiatique, est devenue légitime et s’invite dorénavant un peu partout dans les débats, mais aussi dans les projets et actions.
E. PROJET POLITIQUE ENCORE HÉSITANT !
Même si pour l’instant aucun parti politique majeur ne se revendique directement de la décroissance, ses idées semblent pourtant s’installer. La critique de la croissance, ou l’ »a-croissance », a été directement revendiquée par au moins deux candidats à la dernière élection présidentielle française : Benoît Hamon, qui dit « avoir rompu avec le productivisme et ne plus croire en la croissance économique » et Jean-Luc Mélenchon, pour qui « la décroissance n’est pas une option, c’est une nécessité ». On peut aussi citer la candidate issue de la primaire citoyenne, Charlotte Marchandise, dont la proposition de revenu de base partiellement démonétarisé s’inspire de l’idée de dotation inconditionnelle d’autonomie développée dans un « Projet de décroissance »(8). On assiste aussi à l’étranger à l’émergence de mouvements radicaux où l’on retrouve bon nombre d’idées chères à la décroissance en terme de justice sociale et environnementale, comme aux États-Unis avec la campagne de Bernie Sanders, ou encore avec l’expérience des listes citoyennes victorieuses aux municipales en Espagne, vers une démocratie directe et une autre gouvernance des communs.
Enfin, en janvier 2018, un « Appel Décroissance » signé par plus de 140 personnalités représentant l’ensemble du spectre politique des décroissants de la sociale démocratie en passant par des membres d’ONG ou des artistes est publié sur Mediapart. En septembre 2018, au Parlement européen de Bruxelles, dans le cadres des conférences internationales de la décroissance, une grande conférence est coorganisée par dix députés européens de cinq familles politiques différentes en partenariat avec ONG et syndicats.
F. POUR RENOUVELER LA RECHERCHE ?
La décroissance a aussi fait une entrée fracassante dans le monde universitaire. A la fin des années 2000, on ne comptait que quelques articles publiés dans des journaux internationaux. Depuis, notamment grâce aux conférences internationales, leur nombre a augmenté de manière exponentielle, tout comme le nombre de mémoires de master, de thèses ou projets de recherches sur le sujet. Cette dynamique questionne de manière épistémologique le monde universitaire, en particulier à travers ses approches interdisciplinaires(9) et son ancrage dans des réseaux de militants et surtout d’expérimentateurs, la méthodologie « recherche action » étant privilégiée.
La décroissance est enseignée et débattue dans les universités et les écoles, où par exemple, on voit apparaître ici ou là, entre autres, des jardins de permaculture ou des ateliers de recyclage mais aussi des méthodes alternatives d’enseignement autour de l’auto-gestion ou de la communication non-violente.
MAIS EST-CE SUFFISANT ?
A. TERRAIN FERTILE POUR LA DÉCROISSANCE… MAIS AUSSI POUR LES POPULISMES…
Ces crises et dynamiques constituent en effet un terrain fertile à l’émergence de pensées et propositions radicales et émancipatrices. Mais elles sont aussi un terreau favorable à l’émergence de solutions simplistes et démagogiques et donc dangereuses tant les peurs réelles ou construites et défis sont grands. Si les idées de la décroissance gagnent indéniablement du terrain d’un point de vue culturel, force est de constater la difficulté qu’elle rencontre dans le cadre des élections. En effet, et pour plusieurs raisons, les forces démagogiques et opportunistes, tout en récupérant certaines idées radicales que nous portons, rencontrent bien plus de succès. Cela pose la question de notre modèle démocratique limité à son seul outil représentatif et du discrédit grandissant de nos institutions et « élites ». Le système médiatique dominant fait la part belle à la politique spectacle à la montée de l’insignifiance autour de petites formules (en particulier avec Twitter) ou de questions de personne (qui va remplacer Nicolas Hulot et non les raisons profondes et argumentées de sa démission)… Enfin, les peurs autour de l’extrême droite sont instrumentalisées pour éluder les débats de fond et ne surtout rien changer(10).
B. DÉCROISSANCE OU TRANSHUMANISME ?
Ces dérives peuvent s’accompagner de rejets violents. Ainsi, à la suite de l’élection de Trump, une de ses supporters tweettait : « @realDonaldTrump must make the case to the American people & shut down the “degrowth” movement once & for all ! » (« Donald Trump […] doit en finir avec le mouvement de la décroissance une fois pour toutes ! »).
On retrouve ce genre d’attaques violentes, entre autres, dans le livre de l’ex-candidat déchu des Républicains François Fillon, à travers cette ode au technoscientisme : « Nous avons inventé une nouvelle religion, celle de la décroissance, qui consiste à brider les capacités les plus hautes de l’esprit humain. »
En parallèle, et tout aussi inquiétant, on observe l’omniprésence médiatique du transhumanisme, de l’intelligence artificielle ou encore de la « troisième révolution industrielle ». Ce traitement médiatique est dénué de toute prise de recul critique. Ces nouvelles odes au progrès viennent justifier les investissements énormes dans la recherche, qui s‘effectuent, sans qu’aucun débat démocratique ne soit organisé sur les enjeux éthiques, écologiques et sociaux que ces sujets soulèvent. Dormez tranquille, la science va nous sauver, les technologies vertes et propres vont remplacer le pétrole, les algorithmes vont répondre à tous nos besoins, même les moins essentiels et les grands projets inutiles imposés vont relancer la croissance, verte, inclusive et intelligente il va de soi…
Il s’agit bien là d’un choix de société entre une vision qui questionne la démesure de notre modèle productiviste et consumériste et pose la question des limites et une autre engagée dans une fuite en avant et dans la croyance que nous pouvons dominer la nature grâce aux sciences et technologies. Un des enjeux de la décroissance est d’imposer un débat citoyen sur ce choix sociétal.
C. AVONS NOUS LE TEMPS POUR UN CHANGEMENT DE PARADIGME DÉMOCRATIQUE ?
La décroissance est une pensée complexe et radicale, dans le sens de prendre les problèmes à la racine, qui fait le lien entre différentes disciplines et problématiques. Elle invite à une décolonisation de l’imaginaire, un changement de paradigme à travers ses réflexions autour de la critique du travail, le réencastrement de l’économie, la convivialité ou l’autonomie par exemple. Elle s’appuie sur diverses propositions comme la Dotation Inconditionnelle d’Autonomie couplée à un Revenu Maximum Acceptable. Malheureusement, dans une société du spectacle comme la notre, de tels débats ne trouvent pas leur place dans les médias dominant où instantanéité et invectives dominent.
De plus, une telle transformation demande du temps, d’où une forte contradiction alors que nous faisons face à l’urgence.
Souvent, lorsque l’on parle de décroissance, on met en avant des exemples remarquables, riche de sens et d’enseignement mais qui sont toujours à petite échelle. Ainsi revient toujours la question du changement d’échelle, des institutions et du rôle des multinationales dans un projet de décroissance, de la remise en question non-violente du droit de propriété vers une réappropriation de l’usage et une gouvernance démocratique des communs. Ces questions ne sont pas simples et les réponses apportées, bien que cohérentes, semblent parfois trop complexes pour convaincre de leurs faisabilités. Il est plus facile d’imaginer l’effondrement de notre civilisation techno-industrielle que la sortie du capitalisme…
Comme la décroissance, en tant que slogan provocateur, le dénonce depuis ses débuts, on assiste à une tentative de réappropriation de cette prise de conscience environnementale par les multinationales, des politiques dominants ou encore la publicité : « développement durable », « croissance verte, soutenable, inclusive ou encore intelligente », solutions technologiques à travers de soi-disant énergies vertes, renouvelables ou encore voitures et bâtiments, « smart »… Cette impasse ne fait que déplacer les problèmes pour mieux les éluder…
QUELQUES PISTES DE RÉFLEXIONS :
A. ESSAIMER…
Malgré des avancées non négligeables des idées, thématiques et pratiques portées par la décroissance dans nos sociétés, nous sommes encore loin d’une transformation radicale à la hauteur des enjeux et des urgences. En particulier, cette dynamique n’a pour l’instant aucun impact du point de vue des limites physiques de la croissance que l’on dépasse toujours plus, au risque d’atteindre des seuils de non-retour, pas plus que sur les inégalités qui ne cessent d’augmenter. Mais l’histoire n’est ni linéaire ni prévisible comme nous le montre les théories sur la masse critique, stratégie sur laquelle la décroissance s’appuie. Face aux barbaries présentes et à venir, la décroissance avec ses compagnons de route, invite à essaimer des graines : pour comprendre les enjeux du XXIe siècle, pour inviter à se poser les bonnes questions, expérimenter et mettre en avant de bonnes solutions déjà en place, ouvrir des débats autour de nos propositions, etc. C’est à travers un tel essaimage, mais aussi grâce à des conditions fertiles qu’il sera possible, petit à petit, de vraiment transformer en profondeur notre modèle de société toxico-dépendant à la croissance.
B. ON S’ARRÊTE, ON RÉFLÉCHIT ET C’EST PAS TRISTE…
Nous sommes dans des sociétés où le temps est devenu une denrée rare. Pourtant l’urgence de ralentir est devenu un enjeu central. Nous devons donc réfléchir à des stratégies afin de retrouver du temps pour se poser les bonnes questions (consommer moins pour travailler moins pour vivre mieux). Face à la complexité des enjeux mais aussi l’ampleur des transformations nécessaires, il est important de créer des espaces de dialogues bienveillants, dans une logique d’écoute, de questionnement. Le but est d’ouvrir ces débats, loin des joutes médiatiques annihilantes, loin des postures et des slogans afin d’aller en profondeur et de co-construire une sortie sereine de nos toxico-dépendances à la croissance.
C. LA TRANSITION EST EN MARCHE…
Ainsi, l’enjeu n’est pas de convaincre mais d’arriver à mettre les bonnes questions au cœur des débats et continuer à faire bouger les lignes. L’enjeu n’est pas de construire un mouvement de masse unifié mais bel et bien d’assumer cette complexité, cette « (bio)diversité » nécessaires que représentent une transformation culturelle profonde de la société. L’enjeu est d’être prêt pour que lorsque des chocs traverseront nos sociétés, la « pédagogie des catastrophes » l’emporte sur la « stratégie du choc », la politique sur le repli ou le déni.
A travers divers supports, il est important de proposer une vision claire de ce que pourrait être des sociétés de décroissance, soutenables, autonomes, conviviales, relocalisées mais ouvertes. Il est important d’être crédible en mettant en avant à la fois des bonnes pratiques mais aussi des propositions qui permettent leurs extensions ou comment penser un changement d’échelle de manière horizontale et auto-gérée. Il est encore plus important de rendre visible l’invisible (ces bonnes pratiques, cette transformation en marche mais encore plus ce qui est le plus important dans nos vies, c’est-à-dire les relations humaines) et se détourner de la pollution informationnelle imposée par les médias dominants (peurs, publicité, fait-divers, économcisme, réalisme, matérialisme, etc.).
D. FACE AU DÉSESPOIR DU RÉALISME, UN MESSAGE D’ESPOIR…
Nous avons effectivement beaucoup de bonnes raisons d’être inquiet face aux conséquences de l’effondrement de notre société toxico-dépendante à la croissance, mais on peut aussi avoir beaucoup de bonnes raisons d’espérer qu’il est encore possible de minimiser les violences présentes et à venir à travers du dialogues, des convergences et la création d’espaces de sérénité afin d’appuyer cette transformation silencieuse en cours et de créer les conditions pour l’émergence d’autres modèles de société. La décroissance sera politique ou ne sera pas !
Vincent Liegey est ingénieur, chercheur interdisciplinaire, essayiste, et conférencier. Co-auteur de Un Projet de Décroissance (Éditions Utopia, 2013), il est co-coordinateur de la coopérative sociale Cargonomia et du collectif d’organisation des conférences Internationales de la Décroissance. www.Projet-Decroissance.net
Ce texte s’appuie sur une présentation faite lors des Deuxièmes journées « Serge Latouche et la Décroissance » à l’université de Clermont-Ferrand en juin 2017 et a été mis à jour en septembre 2018.
Bibliographie :
Décroissance. Vocabulaire pour une nouvelle ère, Passager Clandestin, 2015, Giacomo D’Alisa, Federico Demaria et Giorgos Kallis
Le pari de la Décroissance, Fayard, 2006, Serge Latouche
Un Projet de Décroissance, Manifeste pour une Dotation Inconditionnelle d’Autonomie, Utopia, 2013, Vincent Liegey, Stéphane Madelaine, Christophe Ondet, Anisabel Veillot
Notes :
(1) Retrouver le dossier dans Politis, L’HEBDO N° 1391, 17 février 2016, Patrick Piro.
(2) La Stratégie du choc : Montée d’un capitalisme du désastre [« The Shock Doctrine: The Rise of Disaster Capitalism], Actes Sud, coll. « Babel », 2010, Naomi Klein.
(3) Pour un catastrophisme éclairé. Quand l’impossible est certain, Seuil, 2004, Jean-Pierre Dupuy.
(4) BioScience, Volume 67, Issue 12, 1 December 2017, Pages 1026–1028
(5) Lire, entre autres, cet article du Monde (Nicolas Santolaria, 13 octobre 2016) : « Après le burn-out et le bore-out, voici le brown-out »
(6) Un million de révolutions tranquilles : Comment les citoyens changent le monde, Les Liens qui Libèrent (LLL), 2012, Bénédicte Manier.
(7) Demain, 2015, Cyril Dion et Mélanie Laurent.
(8) Un Projet de Décroissance, Manifeste pour une Dotation Inconditionnelle d’Autonomie, Utopia, 2013, Vincent Liegey, Stéphane Madelaine, Christophe Ondet et Anisabel Veillot.
(9) What is Degrowth? From an Activist Slogan to a Social Movement, Environmental Values, Volume 22, Number 2, April 2013, pp. 191-215(25), Federico Demaria, Francois Schneider, Filka Sekulova, Joan Martinez-Alier.
(10) Lire entre autres « Front national, ce diable de confort qui permet de cacher les alternatives au capitalisme » ou encore « La victoire d’Orbán, un symptôme de plus du malaise démocratique »
Légende : Manifestation contre l’EPR, Lyon, 17 mars 2007, place Bellecour. Banderole du Parti pour la décroissance
Crédits : Yann / Wikimedia Commons