Face à l’effondrement, une forêt comestible et des jardins partagés naissent à Budapest

Pour lutter contre le tout-béton et fournir aux citadins une nourriture locale, des habitants de Budapest plantent des jardins-forêts comestibles. Verdir la ville, rendre les espaces publics aux habitants, préparer…

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Des « jardins-forêts » comestibles au coeur des villes face au réchauffement et à l’effondrement de la biodiversité

Imaginer des villes où le béton laisserait progressivement la place à des « jardins-forêts comestibles » : c’est le pari lancé à Budapest, grâce à l’autogestion et à des initiatives spontanées. « Dès le…

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Face à l’effondrement, la décroissance !

Face à l’effondrement, la décroissance !

Vincent Liegey, essayiste et objecteur de croissance, nous explique pourquoi la décroissance peut être un moyen de concrétiser politiquement une transformation silencieuse de la société.

Au printemps 2016, le journal Politis publie un dossier sur la décroissance intitulé « Une révolution silencieuse ? »(1). En effet, la décroissance en France semble moins visible dans les débats politiques qu’il y a quelques années. Pourtant elle gagne du terrain dans les têtes, beaucoup de ses idées centrales s’imposent dans les débats, certes souvent déconnectées les unes des autres. Assisterait-on à une transformation silencieuse de la société ? Est-ce suffisant ? Cet article propose d’abord une mise en perspective des avancées culturelles et sociétales de certaines idées et thématiques portées par la décroissance. Ces avancées sont accompagnées de chocs, de prises de consciences sur l’effondrement : offrent t-elles un terrain toujours plus fertile à une transformation salvatrice et émancipatrice ? Dans un deuxième temps, il pose la question des risques de récupération et défis que rencontrent ces avancées : pourquoi une transformation culturelle est nécessaire mais non suffisante ? Enfin, la troisième partie, en guise de conclusion, propose des pistes de solutions s’appuyant sur ces avancées ou comment les concrétiser.

LA TRANSITION EST EN MARCHE ?

A. DES CHOCS, DES PRISES DE CONSCIENCE, DU MAL-ÊTRE : UN TERRAIN FERTILE ?

Nos sociétés sont traversées par des chocs et des catastrophes : phénomènes météorologiques exceptionnels toujours plus forts et plus fréquents (l’été 2018 a semble-t-il marqué les esprits de ce point de vue !), catastrophes industrielles, crises et instabilités économiques, chômage et montée des inégalités, plans d’austérité, terrorisme, « crise » des réfugiés et des migrants, chocs politiques, du Brexit à l’élection de Trump pour ne citer que ces deux exemples.

Cette situation qui inquiète et nous interpelle, offre de la légitimité à des idées plus radicales, pour le pire, avec la « stratégie du choc »(2) ou peut-être de manière salvatrice avec la « pédagogie des catastrophes »(3). Toutefois force est de constater qu’elle permet des questionnements et débats sur les fondements et limites de notre modèle de société basé sur le toujours plus.

B. COLLAPSOLOGIE ?

En parallèle, un consensus relativement large s’est installé dans nos sociétés quant aux enjeux écologiques : là où, il y a quelques années, le changement climatique ou encore la chute de la biodiversité étaient ignorés ou secondaires dans les débats, ils ne peuvent dorénavant plus être ni éludés ni rejetés.

Ainsi, en novembre 2017, Le Figaro titrait « Nous mettons en péril notre avenir » et Le Monde « Le cri d’alarme de quinze mille scientifiques sur l’état de la planète » suite au manifeste signé par 15 364 scientifiques de 184 pays, paru dans la revue BioScience(4). Cela est encore encore plus spectaculaire à la suite de la démission médiatique et politisée du ministre de la Transition écologique et solidaire du gouvernement Macron, Nicolas Hulot. Ce retrait a été suivi par un grand nombre de tribunes, appels, textes collectifs appelant à un sursaut politique, à un changement de paradigme.

Cette prise de conscience sur l’ampleur des enjeux offre une légitimité aux idées de la décroissance qui sont aujourd’hui écoutées, mais pas nécessairement entendues. La décroissance nécessite des transformations radicales qui paraissent difficiles à enclencher, et la multidimensionnalité de son approche est difficilement traduisible dans un espace médiatique et politique qui tend à partitionner et segmenter son approche systémique, pourtant nécessaire.

C. MAL-ÊTRE AU TRAVAIL ?

L’urgence n’est pas seulement environnementale, mais aussi sociale et culturelle. Ainsi, plusieurs études et indicateurs soulignent le mal-être grandissant dans nos sociétés occidentales face à une perte de sens, au stress, à la dictature des indicateurs (en particulier économiques) et la mise en place d’objectifs absurdes ou impossibles ou encore à l’instabilité économiques. Ces dernières années, ont vu paraître articles et études sur le mal-être au travail : travailleurs pauvres, « burn-out », « bore-out » ou encore « brown-out » et autres « bullshit jobs »(5)

D. ECONOMICISATION DU MONDE ?

Ce mal-être est lié à notre modèle sociétal englué dans la religion de l’économie. Ainsi, la crise de 2008 a mis en avant les pratiques et dérives de la financiarisation de l’économie. Les banques et le système financier, sauvés par les pouvoirs publics, semblent s’être enfermés dans les mêmes dynamiques mortifères. En parallèle, le développement du journalisme d’investigation ont mis en évidence scandales politiques (évasion fiscale généralisée avec les Panama Papers et LuxLeaks) ou industriels (du Dieselgate impliquant presque l’ensemble des compagnies automobiles à l’obsolescence programmée avérée avec le cas des iPhones 6 et 7). Enfin, la montée des inégalités participe à créer un climat de défiance envers les élites médiatiques et économiques (voir les rapports annuels de l’ONG Oxfam qui souligne que « les 1 % les plus riches possèdent désormais davantage que les 99 % restants » et cette dynamique ne fait que s’accélérer).

E. DES IDÉES PORTÉES PAR LA DÉCROISSANCE GAGNENT DU TERRAIN

Plusieurs études convergentes semblent montrer que des idées, thématiques et pratiques portées, entre autres, par la décroissance interpellent culturellement nos sociétés. Il y a quelques années ce slogan provocateur suscitait ignorance, moquerie ou rejet violent. Bien qu’il soit toujours critiqué, le mouvement semble dorénavant crédible et légitime, mais c’est surtout ce qu’il porte comme projet qui semble culturellement infuser.
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Interview We can be heroes !

Interview réalisée dans le cadre du projet We can be heroes, tour d’Europe à la rencontre des acteurs du changement : « La décroissance avec Vincent »

PEUX-TU TE PRÉSENTER ?

Je m’appelle Vincent Liegey, je suis ingénieur de formation, co-fondateur de Cargonomia et également co-auteur d’Un Projet de Décroissance (Utopia, 2013).

COMMENT AS-TU INTÉGRÉ LES RÉSEAUX ALTERMONDIALISTES ?

« Je sentais que quelque chose ne tournait pas rond dans notre économie. »

Au cours de mes études au début des années 2000, j’ai reçu une bourse et je suis parti 6 mois en Hongrie et 6 mois aux États-Unis. Une fois mon diplôme en poche, j’ai décidé de faire comme toi et voyager en Europe Centrale et Orientale. J’ai ensuite trouvé un travail à l’Ambassade de France. Je m’intéressais à l’époque à l’économie, à J.M.Keynes notamment via Bernard Marris. Altermondialiste, je me suis rapproché des réseaux hongrois, où les questions environnementales étaient plus présentes qu’en France. Puis j’ai découvert l’auteur Nicholas Georgescu-Roegen, et c’est ainsi que j’ai fait le lien entre la problématique environnementale et les questions de justice sociale, de limite physique de la croissance, etc. Je sentais que quelque chose ne tournait pas rond dans notre économie. c’est comme cela que j’ai mis un pied dans la décroissance. En rentrant en France, j’ai intégré le Parti Pour La Décroissance en 2008 et je suis devenu l’un de ses porte-paroles. J’ai participé de près ou de loin à différentes campagnes électorales, en France et puis en Hongrie avec la création du mouvement Une autre Politique est Possible (LMP) dans un contexte politique tendu avec l’arrivée de l’extrême-droite, la mise en place des politiques d’austérité et avant la prise de pouvoir d’Orban.

AS-TU VU UNE DIFFÉRENCE ENTRE LES MOUVEMENTS ALTERNATIFS DE PARIS ET DE BUDAPEST ?

Une vraie différence oui ! À Paris, nous organisions difficilement une réunion faute de lieu, nous comptions sur l’aide de mouvements comme Jeudi Noir pour avoir un espace. Les premiers ateliers autogérés de réparation de vélos se créaient dans des squats, mais c’était la galère et souvent éphémère. À Budapest, les lieux alternatifs ont émergé assez rapidement. En revenant vivre en 2011 à Budapest, je me rends compte que ce dont je rêve de fonder à Paris existe déjà en Hongrie. Ils ne le savent pas car la démarche n’est pas politisée, elle est intellectualisée d’une autre manière. Je découvre une créativité et une solidarité incroyables. Et surtout, pas de pression immobilière aussi forte qu’à Paris ce qui oblige les porteurs de projet à s’inscrire soit dans les logiques de marché pour dégager du chiffre soit à rester dans les milieux squats. Ici, un modèle économique alternatif est possible avec de la débrouille et l’économie de réciprocité en s’appuyant sur des projets développés localement.

« Ici, un modèle économique alternatif est possible avec de la débrouille et l’économie de réciprocité en s’appuyant sur des projets développés localement. »

COMMENT AS-TU CRÉÉ CARGONOMIA ?

À mon retour en Hongrie, tout en commençant un doctorat à l’université d’économie de Budapest – que je ne finirai vraisemblablement jamais –, on me propose le poste de responsable des débats d’idées à l’Institut Français de Budapest. Ayant déjà travaillé à l’Ambassade de France, j’hésite pour finalement accepter sous la condition d’avoir une certaine liberté d’action. J’y passe de merveilleuses années en organisant des colloques complexes et osés comme (Ré)inventer la démocratie, sur la question des médias ou de l’agroécologie. J’ai la chance de rencontrer beaucoup de gens formidables et créer des coopérations en les mettant en réseaux. Nous essayons de créer du dialogue et de comprendre la complexité de ce qui se passe en Hongrie. Malheureusement, les équipes bougent, la stratégie générale aussi…Je décide alors de démissionner pour me consacrer à d’autres projets.

Je m’installe dans un lieu alternatif de 300m² dans le centre de Budapest. Je retrouve Adrien, un ancien ami de la Vélorution, et rencontre des colocataires actifs dans les milieux culturels. Nous organisons des concerts, pièces de théâtre, workshops, projections, etc. Un foyer idéal donc pour créer un centre d’expérimentation et de recherche sur la transition et la décroissance ! Avec Adrien nous créons un collectif puis montons la coopérative sociale Cyclonomia, un atelier de réparation de vélos mais aussi de création et fabrication de vélos-cargos. Mon ami Levi qui vient de créer une entreprise de coursier, nous rejoint. C’est ensuite au tour d’une ferme bio dans la périphérie de Budapest via un autre ami, Logan, qui s’installe lui aussi dans notre collocation. Le projet Cargonomia se structure petit à petit sur la base de relations informelles et coopérations réelles.

QU’EST-CE QUE CARGONOMIA ?

Cargonomia, c’est la rencontre, sous forme de collectif, de 3 projets expérimentant ce que pourrait être la société de demain, une société soutenable et souhaitable où l’économie est au service du bien-être social :

Kantaa, entreprise sociale de coursier voulant utiliser des vélos-cargos et transporter des biens qui ont du sens ;
La ferme en biodynamie de Zsambok, qui a une AMAP dans Budapest, c’est aussi un lieu ouvert d’auto-apprentissage, d’éveil et de recherche ;
Cyclonomia, atelier participatif et fabricant les vélos-cargos. C’est aussi un espace ouvert d’apprentissages autour du low-tech et d’organisation d’évènements conviviaux ou de distribution de fruits et légumes bio.

Nous partageons également un lieu en commun où nous organisons des évènements comme des ateliers – tricots, repair café, recyclage – ou des discussions – autour de la sociocratie ou de la communication non violente par exemple.

Nous avons aussi d’autres projets éducationnels et de recherche. De même ce lieu a été le siège de l’organisation de la 5ème conférence internationale de la Décroissance qui s’est tenue à Budapest en 2016.

SELON TOI, QU’EST-CE QUE QU’UNE « SOCIÉTÉ SOUTENABLE ET SOUHAITABLE » ?

J’aime cette métaphore de l’escargot d’Ivan Illich : quand l’escargot fait sa coquille, le poids et la taille de cette dernière augmentent de manière exponentielle. Arrivée à la bonne taille, un tour de plus multiplierait son poids de manière tellement forte que l’escargot ne pourrait plus bouger et serait donc amené à mourir. Au lieu de continuer à croître, il s’arrête et part dans l’autre sens pour améliorer la résistance et le confort de sa coquille. C’est cette logique de savoir s’arrêter et se concentrer sur la qualité qui caractérise à mon sens une société plus humaine.

C’est tout l’inverse de la vie que je menais à Paris. J’étais responsable de la sécurité ferroviaire à la gare Paris-Austerlitz. Pour un objecteur de croissance, c’était totalement schizophrène : courir partout avec de moins en moins de moyens, faire rouler toujours plus vite toujours plus de trains pour que les gens vivent toujours plus loin pour travailler dans des bullshit jobs sur Paris. Ce système est complètement absurde.

QUE VOUS APPORTE CE TYPE D’ORGANISATION QU’EST LE COLLECTIF DANS VOTRE MANIÈRE DE TRAVAILLER ENSEMBLE ?

Nous avons beaucoup de liberté puisque notre investissement initial est faible. Les prises de décision se font de manière organique et se font assez naturellement au grès des projets de chacun. Les 4 co-fondateurs ont un réseau assez large, que ce soit en Hongrie ou à l’échelle européenne. Il nous est alors très facile de trouver des projets porteurs de sens pour nous mais aussi des personnes de confiance avec qui travailler. Le but est de créer des synergies de manière horizontale afin d’expérimenter plusieurs approches pour chaque projet : approche plutôt « décroissance » une fois, plutôt « entrepreneuriat social » une autre fois par exemple. De même, la diversité des partenaires et la complémentarité des personnes nous offrent la possibilité d’être transversal et interdisciplinaire, ce qui est fondamental en terme de cohérence.

QUEL EST VOTRE MODÈLE ÉCONOMIQUE ?

D’abord : pas d’emprunt. Nous nous appuyons sur des choses existantes et faisons ce que l’on est capable de faire. On avance ensemble sans se mettre en danger, dans l’idée du « small is beautiful« . Cela nous permet de toucher un peu à tout. Nous avons chacun des projets avec et en dehors de Cargonomia : projets de recherche, travail avec des think tank ou des entreprises. On met dans le pot commun et on s’auto-institue directement une forme de dotation inconditionnelle d’autonomie.

« C’est en faisant que les relations se construisent. »

Pour le règlement des services avec les partenaires, tout est possible. Parfois nous nous rendons des services, d’autres fois on le paye. C’est en faisant que les relations se construisent.

Nous ne répondons pas trop à des appels d’offre car c’est chronophage et il faut à tout prix rentrer dans des cases. Ton organisation a besoin d’une administration et un budget correspondant aux cadres imposés par le projet. Cela ne correspond pas à notre manière de travailler. L’argent crée plus de problèmes qu’autre chose. Nous ne souhaitons pas être une organisation dont toute l’énergie passe par rechercher de l’argent, justifier son utilisation et son administration !

Le seul engagement financier que nous avons est le loyer à hauteur de 400 euros par mois. Nous avons une réserve de 6 mois pour pouvoir rebondir si besoin. Ce mode de fonctionnement a été très influencé par mes lectures sur l’endettement. Toutefois, nous avons toujours ces débats entre comment rester cohérent et convivial et changer d’échelle afin d’avoir un impact plus important.

VOUS VOUS REVERSEZ DONC UNE ALLOCATION D’AUTONOMIE ?

En effet, j’ai la chance d’avoir de l’argent de côté, un large réseau et d’être impliqué dans plein de projets choisis ce qui me permet de refuser un emploi classique, c’est un luxe ! J’en profite pour expérimenter sur moi-même une situation de revenu de base pour vraiment comprendre ses effets sur mes relations au travail, à l’autre mais aussi sur ma vie personnelle. Je me rends compte que je suis plus efficace et plus productif sans être stressé, sans avoir la contrainte de rentrer dans un cadre. L’économie sociale et solidaire en France est complètement dépendante des subventions et du bon vouloir politique. Je pense que le monde associatif serait bien plus efficace avec un revenu de base car plus autonome, responsable et créatif.

QUELS SONT LES APPRENTISSAGES QUE TU RETIRES DE CETTE EXPÉRIENCE À CARGONOMIA ?

Que les modes de vie alternatifs fonctionnent beaucoup mieux que ceux où le marché et les logiques de profit sont centraux dans l’organisation sociale. Tu retrouves de la confiance, de la solidarité, de l’échange de savoir-faire, de l’harmonie et tu n’as pas d’administratif, d’heures perdues à écrire des contrats, à faire du contrôle, etc. C’est ce que nous expérimentons chaque jour.

Au départ j’avais une vision de la politique très française : très institutionnelle mais aussi centralisée. Mes expériences m’ont appris l’importance de repenser notre rapport au pouvoir : comment changer la société sans le prendre. Si on prend le pouvoir on est pris par lui. Mais il ne faut pas le laisser et il faut à la fois faire pression, résister face à l’inacceptable et en parallèle construire, expérimenter de nouveaux mondes soutenables et souhaitables. Cela participe aussi à une transformation culturelle de la société qui est la base à d’autres transformations. À force d’expérimenter, j’ai compris que c’est à travers des collectifs comme Cargonomia que je peux m’émanciper, non sans contradiction bien entendu, mais avec une cohérence dans ma vie. On a tous des parcours avec un pied dans le système et un pied dans les milieux alternatifs. Je pense que c’est un bon moyen de créer des ponts entre ces différents acteurs et c’est très enrichissant… et en plus avoir raison tout seul c’est avoir tort !

En Hongrie, je ressens moins cette pression du paraître que l’on retrouve en France : il faut montrer que tu es débordé, quitte à en devenir contre-productif…C’est absurde. Je ne passe pas plus de 2 jours par semaine sur la partie opérationnelle, le reste doit être un temps pour réfléchir et valoriser cette expérience dans des logiques de dialogue et de rencontres. C’est un luxe énorme, mais je pense que cela est vraiment nécessaire pour se recentrer sur son projet de vie, s’ouvrir aux autres, découvrir de nouvelles initiatives mais également en inspirer certaines.

Enfin, je me rends compte que l’on a toujours eu cette sagesse de ne jamais forcer quoique ce soit. Si le projet ne prend pas, on ne s’obstine pas mais on réfléchit sur les difficultés rencontrées et on laisse le temps au temps… puis finalement, sans s’en rendre compte, le projet a pris.

COMMENT LE PROJET POURRAIT SE RETROUVER FRAGILISÉ, VOIRE S’ARRÊTER ?

Une alternative est toujours une initiative incarnée. Ce n’est ni une solution technique ni un modèle économique mais une aventure humaine. Et dans ce cas, il faut être bon dans tout, être débrouillard, connaître l’écosystème et ses acteurs, être multitâche, aimer les conflits et dynamiques de groupes, faire vivre l’intelligence collective. Cela demande une grande motivation et beaucoup d’engagement.

« Une alternative est toujours une initiative incarnée. »

L’autre risque provient du développement économique de Budapest, notamment la montée des prix de l’immobilier conséquence du tourisme de masse (qui participe aussi à tuer culturellement la ville !). Si le coût de la vie augmente, nous devrons changer notre modèle économique car l’économie de réciprocité et la débrouille ne seront plus suffisantes pour avoir une vie décente, tant pour nous que pour l’ensemble de nos partenaires. La philosophie de Cargonomia en serait alors impactée : quand tu commences à croître, tu n’as plus les mêmes relations humaines. Aujourd’hui nous fonctionnons par les relations amicales et la confiance. Et nous ne souhaitons ne pas perdre cette démarche qui génère efficacité, plaisir, bien être et cohérence.

QUELS SONT LES GRANDS CHALLENGES À SURMONTER ET COMMENT Y FAIRE FACE ?

Il n’y a pas de grand soir, la transformation de la société est forcément un long processus. Il faut être patient, humble, et continuer chaque jour à rencontrer et écouter les gens. Ce travail d’essaimage est ingrat puisque tu ne vois pas d’effets directs. Par moment, c’est assez difficile moralement.

Pour permettre les conditions de cette transformation, il y a 2 piliers fondamentaux sur lesquels nous travaillons à Cargomania. C’est d’abord l’éducation populaire via les travaux de recherche et les échanges avec les jeunes. Puis c’est le lobbying politique. Le lobbying, c’est résister et faire pression sur nos institutions et nos modèles socio-économiques pour permettre à d’autres de pouvoir expérimenter, de faire des pas de côté et de rejoindre cette grande dynamique silencieuse de transformation de la société.

OÙ TROUVES-TU TA MOTIVATION ?

Je vais être honnête avec toi, il y a bien entendu une question d’ego. Les précurseurs ont souvent des personnalités assez fortes. Mais l’ego, tu peux en faire tout et n’importe quoi. Le système dominant utilise les ambitions et l’ego des personnes pour leur faire accepter des jobs à la con ou des situations totalement infernales. J’ai récemment lu une étude dans laquelle 50% des cadres déclarent avoir déjà pris des décisions contraires à leur éthique. C’est complètement délirant.

La deuxième chose, c’est que je suis fondamentalement un branleur, mais aussi un jouisseur : j’aime la vie, j’aime la convivialité, j’aime être libre, autonome et faire ce qui me paraît important, m’auto-instituer mes propres règles. J’ai envie de pouvoir me lever le matin et savoir que je donne du sens à ma vie et que mon travail a un impact bénéfique pour les autres et surtout pas accepter de donner 8 heures de ma vive en fermant les yeux et en participant à l’exploitation et à l’absurdité de notre monde productif et consumériste. C’est le refus de la servitude volontaire !

SI TU DEVAIS DÉFINIR TON ENGAGEMENT EN UN MOT, ADJECTIF OU SENTIMENT…

Je dirais la convivialité, c’est à la fois la Démocratie, les institutions, le rapport au temps, à la nature, à l’économie et à l’autre. C’est pour moi un concept philosophique et politique très large. Mais je pourrais aussi parler d’Autonomie au sens de Castoriadis ou encore de dialogue dont nous avons grandement besoin.
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Présentation de Cargonomia

Cargonomia, c’est un centre logistique de distribution de nourriture locale et bio, au moyen de vélos cargos construits sur place de façon artisanale.

Video de la campagne : Cargobike & local food distribution hub – Budapest

Emission radio de présentation de Cargonomia sur Tilos Radio avec Hu-lala.org:

Cargonomia est la formalisation de la coopération entre principalement trois acteurs impliqués dans l’économie sociale et solidaire et participant à la construction de transition vers plus de soutenabilité. Ainsi ce projet réuni la ferme en biodynamie de Zsambok qui propose des paniers AMAP, la coopérative sociale Cyclonomia, atelier vélo participatif qui fabrique de manière artisanale ses propres solution low-tech pour le transport de marchandise en milieu urbain et Kantaa, entreprise de coursier.
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